L’ERP décathlonien du SI ?

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Les Jeux Olympiques de Rio viennent de se terminer et les Jeux Paralympiques débutent aujourd’hui, mercredi. Profitons-en pour filer la métaphore sportive. Si l’on devait associer les solutions informatiques avec des disciplines olympiques, quelles seraient celles qui conviendraient le mieux à l’ERP ?

Il y a fort à parier que les premières réponses vont se concentrer autour de quelques disciplines « de poids » : haltérophilie, lancer de marteau, judo ou boxe poids lourds… L’ERP reste associé, aujourd’hui encore, à des notions de puissance mais aussi de lourdeur. Il symbolise au sein de l’entreprise le projet qui est capable de tout changer, mais au prix d’investissements en temps et en argent considérables.

Cette vision un peu péjorative est-elle encore justifiée ? Probablement non, car l’ERP a évolué. Comme toujours lorsqu’une évolution se produit, elle peut être lente et sembler imperceptible à l’observateur non averti, mais elle est pourtant bien tangible. Voici pourquoi.

Ne pas confondre multiplicité et polyvalence

Certes, il faut le reconnaitre, l’ERP reste un projet engageant pour l’entreprise, qui plus est pour la PME. Et chaque DSI garde en tête l’histoire, rapportée par tel autre, qui lui-même la tenait d’un troisième, d’une entreprise qui a raté son projet ERP au point de mettre en péril son existence. Soit.

Mais si tout cela était fréquent, qui pourrait expliquer pourquoi tant de fournisseurs de solutions ERP gardent une santé florissante, de même que nombre de SSII ont bâti leur succès en accompagnant son développement depuis 30 ans ? Faut-il de même penser que les entreprises s’équipant d’un ERP ont une tendance suicidaire qui les conduirait à s’engager dans des projets forcément pharaoniques et dangereux ? Evidemment non.

L’ambigüité avec l’ERP vient sans doute du fait qu’il semble, au premier abord, en contradiction avec l’une des tendances lourdes des systèmes d’information : la multiplicité des solutions. En effet, la transition numérique aidant, le choix de solutions s’est considérablement étendu, notamment avec l’émergence des phénomènes SaaS et Cloud. On trouve de multiples solutions « best of breed » répondant à de multiples besoins pour de multiples secteurs d’activité.

De là, un raccourci un peu rapide dans l’esprit de certains analystes (mais certainement pas des directions générales ou des DSI), qui voient l’avenir de l’entreprise un peu comme une communauté hippie des années 70, où chaque entité deviendrait totalement autonome, libre de s’équiper avec la solution de son choix. Une sorte d’amplification de la tendance du BYOD (Bring Your On Device), ou chacun est autorisé à utiliser ses équipements / solutions personnelles.

Avec sans doute, dans l’esprit de ces analystes et détracteurs de l’ERP, l’idée que l’on organisera régulièrement un grand séminaire annuel de « réalignement numérique », où chacun sera convié avec la solution qu’il a choisie, et entamera des négociations avec les autres départements pour tenter de s’interfacer au mieux avec ses voisins. Tout cela sous les yeux bienveillants de la direction générale, qui n’aurait plus à se préoccuper d’aligner l’entreprise sur la stratégie de son choix, et en l’absence de la direction informatique qui serait partie en vacances (ou en congés maladie pour dépression ?).

L'ERP, pas un haltérophile mais un décathlonien...

Le modèle énoncé ci-dessus peut sembler séduisant, surtout pour une PME, mais il est loin de la réalité. Ce qui a fait le succès de l’ERP, ce ne sont pas ses capacités techniques pures, mais d’abord le fait qu’il répond à un besoin profond de l’entreprise et de ses dirigeants : organiser la production, structurer, permettre un alignement stratégique des tous les départements et ou filiales.

Personne ne prétend que pour une fonctionnalité spécifique d’un ERP il n’existe pas une solution « best of breed » aussi performante. Mais il s’avère seulement qu’une somme d’excellentes individualités n’est pas la garantie d’obtenir une équipe efficace. Si l’on doit rester dans le domaine de la métaphore sportive, nous avons tous en tête ces matchs où une équipe composée des meilleurs joueurs du monde s’avoue vaincue face à une autre équipe d’anonymes parfaitement cohérente et organisée. Tous ceux qui ont suivi la récente élimination de l’Angleterre par l’Islande lors de l’Euro de football comprendront.

Revenons justement à l’ERP : il ne faut pas (ou plus) l’envisager comme un haltérophile, doté d’une force surhumaine et capable à lui tout seul de porter le poids de votre entreprise sur ses épaules, mais plutôt comme un décathlonien. Ce dernier est capable d’accomplir une multitude de tâches différentes, en disposant des qualités spécifiques de 10 athlètes différents. Mais avec un avantage : celui d’être mû par une seule volonté, un centre de contrôle et d’échange de données unifié. Il apporte à l’entreprise de la polyvalence et de la cohérence et peut se substituer sans difficultés à de multiples athlètes… pardon, solutions. Oui mais, cela est-il suffisant ?

...et pourquoi pas la souplesse du gymnaste ?

La rigidité et la lourdeur supposées de l’ERP sont de plus en plus un mythe. Aujourd’hui, aucun ERP n’est semblable à un autre et chacun est parfaitement adapté à l’entreprise et au contexte économique qui l’a vu naître. S’il ne l’est pas, c’est que le projet a été mal géré ou conçu, mais cela ne remet pas en cause les avantages que tous les autres peuvent apporter aux entreprises de par le monde.

D’ailleurs, la posture qui consiste, de la part de certains analystes, à opposer la « lourdeur » d’un ERP considéré comme monobloc à la « souplesse » d’une multitude de solutions censées répondre aux mêmes besoins est très discutable. Car l’ERP est profondément adaptable, sur de nombreux aspects.

D’une part, il peut faire l’objet de développements spécifiques, et ce terme ne devrait plus faire peur à personne. Panorama Consulting Solutions (PCS), cabinet de conseil américain spécialisé dans le choix et la mise en place d’ERP, note dans ses tendances ERP 2016 que ces développements sont de plus en plus acceptés et fréquents.

D’autre part, tout éditeur d’ERP sérieux dispose d’une offre de modules complète et variée, qui devrait permettre de l’adapter, dès la phase de projet ou dans l’avenir, aux besoins spécifiques de l’entreprise.

Enfin, l’ERP ne doit plus être considéré comme une solution « fermée » et figée. Si le besoin s’en fait sentir, un bon éditeur saurainterfacer son ERP avec une solution qui vous tient particulièrement à cœur, ou qui semble indispensable à une DG, un département spécifique ou une DSI.

Dès lors, l’haltérophile est bel et bien oublié et le décathlonien doit céder lui aussi la place. A un athlète tout aussi polyvalent, capable de passer d’un agrès à l’autre, d’être performant sur le cheval d’arçon, sur la barre fixe, sur les anneaux et au sol, en alliant la plus grande puissance à la plus grande souplesse : le gymnaste. L’ERP du futur est assurément ce gymnaste.